Les surfaces d’engrais verts se développent dans les vignes. Certains vignerons veulent maximiser les biomasses pour accroître la fertilité de leurs sols. Les conseils de Perrine Dubois, dans la Loire, et de Laetitia Caillaud, dans le Cognaçais.
Que les engrais verts soient mis en place pour maintenir la structure du sol et apporter les éléments NPK après destruction ou bien pour obtenir un paillage à rouler avec un gros volume de végétation afin d’assurer la portance, Perrine Dubois de l’ATV49 préconise avant toute chose de vérifier la fertilité du sol. « Il faut avoir un sol suffisamment riche pour que les semis de couverts puissent se développer. Pour certains sols pauvres de notre secteur, notamment des limons superficiels sur roche dure, il faut un minimum de matière organique pour que les couverts poussent. La première étape sera alors d’apporter du fumier. D’ailleurs, dans le cadre d’une plantation, l’idéal est d’apporter une dose importante de fumier un an et demi à deux ans et demi avant la plantation et de jumeler cet apport avec un semis de couverts, afin que les racines des engrais verts entraînent la matière organique en profondeur. »
Développement aérien ou racinaire
Sur la zone Cognac et ses sols plus profonds, avec la recherche de rendements élevés pour atteindre les 14 hl d’alcool pur par hectare, Laetitia Caillaud de la chambre d’agriculture reconnaît que l’objectif des couverts est de produire de la biomasse pour améliorer la fertilité des sols. « Le maître mot pour y arriver est de semer les engrais verts avant les vendanges, à partir du 15 août jusqu’à mi-septembre ! Après, vous n’avez plus le temps, et les levées sont trop tardives pour obtenir de bons développements. Avec des semis courant août, certains craignent des levées qui sèchent par manque d’eau, mais très largement, cela n’arrive pas. »
La conseillère de l’ATV49 indique pour sa part qu’« obtenir une importante biomasse aérienne n’est pas une fin en soi. Un bon développement racinaire est même plus important dans l’objectif d’un couvert temporaire. Alors qu’un semis précoce donnera, avec des conditions climatiques plutôt chaudes et pluvieuses, des couverts bien développés pour les parties aériennes, un semis tardif, à partir de septembre, aboutira à une biomasse racinaire plus importante, comme observé dans un essai ! » Perrine Dubois ajoute que les périodes avant vendanges sont parfois chargées, et que les semis de couverts n’apparaissent pas comme une priorité. « La solution trouvée par un vigneron est de semer deux fois : un rang sur deux avant vendanges, l’autre après. Ainsi, il maximise ses chances de réussir en fonction des conditions météo et de la pression des limaces. »
Quelles espèces choisir ?
Sur le choix des espèces, la conseillère de Charente-Maritime n’est pas adepte des inventaires à la Prévert. « Trois espèces suffisent généralement : une crucifère, une graminée et une légumineuse. Et tout dépend de l’objectif fixé. Pour apporter de l’azote, les légumineuses sont à prioriser, en complément éventuel d’une graminée. Pour le choix des crucifères, l’idéal est de prendre des espèces qui sont calées avec le cycle des autres plantes du couvert. La moutarde est bien trop précoce, avec des floraisons dès octobre… mieux vaut opter pour un colza. » Pour Laetitia Caillaud, pas question de recourir à de la phacélie, « trop coûteuse et risquée en présence de court-noué ». S’il arrive que de l’anthracnose s’installe dans les couverts de féverole, comme en 2017, la conseillère n’y voit pas de problème majeur : « La féverole aura fait une partie de son développement, et la restitution d’éléments fertilisants sera tout de même là. »
Perrine Dubois a une astuce pour bénéficier de semences bon marché en couverts viticoles : se rapprocher de voisins éleveurs qui cultivent des méteils. Ces associations céréales-protéagineux (triticale, avoine, seigle, pois, vesce, féverole…) sont idéales car elles comportent au moins quatre espèces avec une proportion équilibrée céréales et légumineuses, et elles sont peu techniques à semer, d’après la conseillère de l’ATV49, qui note au passage : « Je ne préconise pas trop les crucifères, qui n’ont pas un grand intérêt pour la structure du sol et qui ont tendance à envahir l’espace aux dépens des autres espèces semées. »
Limiter les intrants
Si les doses de semis sont importantes à respecter (exemple : 100 kg d’avoine et 100 kg de féverole/ha en en plein, avec 4 kg de colza), c’est surtout la qualité de semis (préparation fine du sol, profondeur de semis adaptée aux semences, roulage après semis, conditions de travail optimales) qui déterminera les bonnes levées. Au sujet des apports de fertilisants comme d’antilimace, les deux conseillères sont contre. « On fait des couverts pour l’environnement ! Si l’on apporte des intrants, je ne vois plus l’intérêt ! » note Laetitia Caillaud. Perrine Dubois préconise ainsi l’emploi d’espèces peu sensibles aux limaces (voir tableau ci-dessous).
Grâce aux suivis réalisés par la CA17 sur les couverts, des estimations de restitutions ont pu être déterminées dans diverses exploitations par la méthode Merci. Pour des destructions de couverts mi-mars, avec des biomasses allant d’1,5 jusqu’à 3,7 t de matière sèche par hectare, les restitutions d’azote se situaient entre 30 et 60 unités en moyenne, et autour de 60 unités en potasse. Un apport non négligeable, qui plus est dans cette période de flambée des cours des engrais. « Certains vignerons déduisent ces apports de leurs calculs de fertilisation, et d’autre non, reconnaît Laetitia Caillaud. Aujourd’hui, le message sur les couverts végétaux en Charentes est bien passé et la pratique est bien étudiée. Ceux qui ont compris l’intérêt ont déjà franchi le pas. Reste à accompagner les autres, pour qu’ils s’y mettent à leur tour ! »
ASTUCE. Dans un semoir avec une unique trémie, pour que les graines de différentes tailles restent bien mélangées, il est possible d’ajouter de l’huile végétale. Les petites graines se colleront aux grosses, permettant d’avoir une descente plus homogène. Quantité conseillée : un verre d’huile pour un mélange de semences dans une poubelle de 50 litres.
Source : www.mon-viti.com